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13 avril 2013 6 13 /04 /avril /2013 21:38

atom

 

Label : Raster-Noton 

Date de sortie : Mars 2013

Genre : Sound Design 

 

 

La réputation du solitaire Uwe Schmidt, le seul et l'unique homme se tenant derrière l’alias Atom™, n’est plus à faire. Avec plus de 200 releases portant le nom de l’un de ses multiples pseudonymes (dont Atom Heart, Señor Coconut et une bonne cinquantaine d'autres) parus depuis 1990, la carrière d’Uwe est donc étonnamment longue et prolifique pour un producteur de musiques électroniques. Il publiait ses maxis sur son propre label, Rather Interesting, alors même que certains d’entre nous tétaient encore le biberon. Une discographie vaste dans des genres différents, du jazz avant-gardiste, à de l’easy listening, en passant par de la pop latino et la « pop artificielle kraftwerkienne ». D’ici quelques mois il aura sans doute encore sorti plusieurs albums mais qu’importe… Sorti aujourd'hui sur le sérieux Raster-Noton qui n’a jamais déçu son public, HD ne fait que conforter l’idée que l’on se faisait déjà du label. Le nom de l'album n’est pas anodin : composé de deux lettres abondamment utilisées dans ce monde où les produits à hautes technologies sont prisés par tous, c’est sans doute le symbole de notre société de consommation. Mais nous y reviendrons plus tard.

 

 

HD, a eu une genèse longue et mouvementée. En effet, les premiers enregistrements ont été effectués en 2005 et le nom de l’album était à l'époque Hard Disc Rock. Mais, suites aux modifications apportées aux titres et à la tracklisting au fil du temps, le projet a quasiment complètement changé de tournure. Entre temps, plusieurs long formats d’Atom™ sont sortis sur Raster Noton : Liedgut, dans un genre proto-techno légèrement « popisé » et assez expérimentale ou encore l’abscon mais délicat Winterreise, entre easy-listening et néoclassique. Avec ce nouveau long format, Uwe Schmidt revient sur une ligne de production faisant à nouveau référence au célèbre quatuor allemand, Kraftwerk, bien qu’il ait apporté d’importantes modifications pour amener plus de dynamisme.

 

Information importante afin de comprendre ce disque : Atom™ a fait un travail introspectif sur ce qu’il était en dehors des codes sociaux et de sa nationalité afin de n’être aucunement influencé dans son travail. Et cela se sent dès le départ sur « Pop HD » qui, malgré ses ressemblances avec ces groupes synth-pop des années 80, n’a rien à voir finalement avec ces derniers. Les origines allemandes ainsi que les influences latino venant de la demeure de Sao Polo d’Uwe ne se font pas pas ressentir. C’est froid, c’est inhumain et c’est diablement précis. La voix française de Jean-Charles Vandermynsbrugge est brute, à mi-chemin entre échantillon synthétique et discours humain. Les rythmiques sont, comme à l’accoutumé sur Raster-Noton, d’une précision chirurgicale voire même plus. On atteint ici, notamment sur Strom ouu Empty, un certain paroxysme dans la précision et l’agencement du son, cette compulsion terriblement humaine de vouloir tout à mettre à sa place avec une perfection méthodique et machinale. L’aspect krafwerkien n’est peut-être ici qu’une façade. Il est difficile de savoir si Uwe tourne en dérision cet élément bien que cela constitue la base de cet album. Peut-être faut-il le rappeler, le groupe mythique était à ses débuts une formation rock et son évolution vers ce qui constituera le socle des musiques pop et électronique a fait couler beaucoup d’encre. Ils étaient et sont encore considérés comme le symbole de ce mouvement, synonyme de « la mort des vrais compositeurs ». Alors que faut-il en conclure ? Uwe révère-t-il ces figures emblématiques ou les haït-il pour ce qu’elles ont causé ? Quoi qu'il en soit, il ne faut pas en douter : l’appauvrissement de la musique du 21e siècle est ici totalement dénoncé, surtout sur Stop (Impérialist Pop), critique clairement explicite avec des paroles vocodé du genre « Sonic invasion, from nation to nation » ou encore « Corporate Sound, In dolby surround ». Ici, il est assez incroyable d’avoir une telle richesse sonore  avec si peu d’éléments.

 

C’est frais, c’est léger sur I Love U (Like I Love My Drum Machine) et l'allure du titre montre bien qu’on oscille entre sérieux et dérision. Tout ceci est déroutant mais paradoxalement, très efficace. The sound Of Decay est peut-être l’exemple le plus marquant, en faisant référence aux groupes hard rock des 30 dernières années avec une basse numérisée et grasse comme il faut et la voix suave de Jorge Gonzales, le tout enveloppé dans des éléments tout à fait modernes. On y voit peut-être l'ombre d’un « robot rock » ou quelque chose du genre, bien que la production d’Uwe, l’homme-machine, soit bien plus luxuriante. Riding The Void est très certainement la chanson du « loveur » du 4e millénaire, tandis que My Generation est l’appel à l’aide d’une adolescence matraquée à coup de Justin Bieber ou de Carly Rae Jepsen, la génération qui croit à l’existence de vampires romantiques et dont pour eux, la date limite d’existence d’un couple est d’une semaine (maximum). Mais comme nous, Atom™ semble aussi complètement désolé, car il ne pourra sauver cette génération perdue dans les affres des réseaux sociaux. Comme le dirait très bien un certain Hal 9000 : « I’m Sorry Dave, I’m afraid I can’t do that. » Référence peu fortuite, puisque Ich bin meine Machine, dernier morceau de l’album, montre la transformation irréversible de l’homme en machine. Cette métamorphose sublime est, semble-t-il, un présage d’une humanité déshumanisée qui ne fait plus attention à son prochain. La machine sera probablement le dernier réceptacle de l’homme prêt à tout pour devenir immortel. Qui sait, peut-être un jour notre âme finira dans une boîte de conserve.

 

 

HD est décidément un album bien troublant en étant si insidieux et si persuasif. On a, à première vue, affaire à une production légère faisant volontairement référence à la synth-pop artificielle par nature. Mais que nenni, toute cette façade est illusoire et s’écroule rapidement pour l'auditeur averti. Ce n’est pas de la techno au sens strict du terme, ni vraiment de la pop édulcorée. Alors qu’est donc ce caméléon ? Une ode à la machine peut-être, quoi que… Atom™ vient donc de produire un album tout à fait universaliste mais qui ne fera malheureusement pas plaisir à tout le monde. Les paradoxes et antithèses foisonnent, donnant à cette musique synthétique plusieurs niveaux de lecture. Un must-have, assurément.

 

Raphael Lenoir 

 

 
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